ENSTA Bretagne : Comment se préparer aux enjeux socio-écologiques ?

Comment se préparer aux enjeux socio-écologiques ?

École
À l’ENSTA Bretagne, la question environnementale est au cœur des programmes en ingénierie. Les équipes pédagogiques et de recherche repensent la formation des ingénieurs et participent à l’innovation maritime en créant de nouvelles connaissances clés pour une économie bleue durable.

La transition écologique est au cœur des réflexions pour proposer un nouveau modèle de société. C’est aussi un objectif majeur de la feuille de route stratégique d’ENSTA Bretagne. Comment  étudiants, enseignants et chercheurs de l’école participent-ils à l’élaboration de nouveaux systèmes et contribuent-ils à l’élaboration d’outils durables ? Les initiatives se sont multipliées. Nous vous proposons trois exemples significatifs de ces contributions : formation des élèves ingénieurs aux enjeux environnementaux, conception de parcs éoliens offshore durables et mesure de l’état écologique d’espaces maritimes.

fresque du climat

Former les élèves ingénieurs à la transition socio-écologique 

Tout débute par des travaux de recherche¹ menés par le laboratoire de sciences humaines et sociales² d’ENSTA Bretagne sur la formation et professionnalisation des ingénieurs. Conduits à l’échelle européenne puis en partenariat avec plusieurs pays du Maghreb, des chercheurs de ce laboratoire ont mené des réflexions sur la meilleure façon de préparer les ingénieurs aux défis sociotechniques que pose le dérèglement climatique. Celles-ci ont par exemple débouché récemment sur les publications de deux ouvrages³ portant sur la formation des ingénieurs du Maghreb face aux enjeux environnementaux, incluant un livret de recommandations⁴ " pour impulser et accompagner les changements à destination des acteurs pédagogiques mais aussi plus largement d’autres acteurs ". Forte de ces résultats, ENSTA Bretagne s’est engagée à appliquer ces principes de transformation à ses élèves ingénieurs. 

Dans un premier temps un parcours « Maritime et développement durable » interdisciplinaire a été mis au point avec l’appui de partenaires brestois⁵. Puis rapidement, dans un contexte où la formation aux enjeux de transition écologique et de développement durable est devenue cruciale pour les futurs ingénieurs, les équipes disciplinaires de l’école ont bâti un parcours expérimental de formation des ingénieurs au développement durable et à la responsabilité sociétale. Proposé à la rentrée 2022, il offre l’opportunité aux étudiants d’intégrer la notion d’impact écologique et sociétal dans leur formation via l’approfondissement de certaines thématiques dans différents cours, en conduite de projet et lors des stages. Déjà 44 étudiants ont choisi de se lancer dans l’aventure ! 

En complément de ce dispositif, un socle commun a été mis en place pour tous les étudiants : « Les ateliers de la transition socio-écologique ». Il comprend trois grands rendez-vous : la fresque du climat, une conférence-débat et l’atelier immersif « 2 tonnes » pour identifier les leviers individuels et collectifs de la transition vers une société bas carbone.

ENSTA Bretagne : formation et recherche en énergies marines renouvelables
Darren Coleshill

Penser la future production électrique et le développement de l’éolien flottant

Si les étudiants se préparent à l’urgence climatique, ils ne sont pas les seuls… Avec la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte⁶ du 17 août 2015, le gouvernement prévoit que 40% de la production d’électricité française soit d’origine renouvelable d’ici 2030. Un objectif ambitieux sur lequel planchent des chercheurs en mécanique et ingénierie maritime d’ENSTA Bretagne, au sein du laboratoire IRDL⁷. En collaboration avec France Énergies Marines et plusieurs partenaires comme Ifremer ou EDF, ils ont choisi d’agir sur la durabilité en mer des éoliennes flottantes. Ces projets de recherche font partie du plan d’investissement France 2030. L’éolien offshore présente l’avantage de produire 60% d’énergie en plus⁸ que l’éolien terrestre. En effet, la vitesse du vent est plus rapide et sa durée plus constante au large des côtes. En contrepartie, la mer et le vent imposent de fortes contraintes mécaniques et physiques sur les parcs éoliens offshore. 

Afin de proposer des systèmes durables, les chercheurs développent des outils de calcul et de conception. Les recherches en cours visent notamment une meilleure prédiction des contraintes liées aux vagues déferlantes et des propriétés mécaniques de nouveaux matériaux, deux moyens d’optimiser la tenue en service des parcs et de réduire le coût des opérations de maintenance.

Codes de calcul, outil de modélisation et de mesure⁹ se développent pour imaginer les dispositifs de demain. Les futures éoliennes flottantes devront disposer d’un mât résistant aux tempêtes et aux vagues les plus violentes ainsi que de câbles semi-rigides pouvant durer en mer au moins 20 ans. Ces câbles servent à retenir la plateforme ou acheminer l’électricité jusqu’au continent. Si aujourd’hui il existe des éoliennes offshore d’une puissance de 6 mégawatts capables d’alimenter en électricité une ville de 5000 habitants, l’objectif à terme est de produire des systèmes d’une puissance de 8 à 10 mégawatts. 

ENSTA Bretagne : Mise en place d'un observatoire en mer d'Iroise

Mesurer l’état écologique de l’environnement maritime

Préparer l’avenir, c’est aussi proposer des méthodes et des outils pour mesurer nos répercussions  sur l’environnement. Ainsi, une équipe de chercheurs en physique marine, systèmes d’observation et traitement de signal d’ENSTA Bretagne (laboratoire Lab-STICC¹⁰) développe des observatoires de longue durée en mer basés sur l’analyse des enregistrements du bruit sous-marin et la reconnaissance des sons. Ces données sont issues d’hydrophones immergés pendant plusieurs mois. Cette méthode d’observation relève d’une discipline d’excellence à l’ENSTA Bretagne : l’acoustique passive. 

En réponse aux besoins de recensement des espèces de cétacés présentes en mer d’Iroise au large du Finistère, l’équipe s’appuie sur cette technologie originale pour déployer depuis début 2022 l’observatoire « Cetiroise ». La demande émane de l’Office français de la biodiversité qui souhaite connaître la fréquence avec laquelle les grands dauphins et autres cétacés utilisent la mer d’Iroise. Avec les équipes du parc marin d’Iroise, les chercheurs d’ENSTA Bretagne ont conçu et installé sept enregistreurs et s’apprêtent à décortiquer et traiter les données acquises durant les premières semaines d’observation. C’est une première sur nos côtes. Ce recensement a pour but d’identifier les répartitions saisonnières et spatiales de l’ensemble des espèces de cétacés qui passent dans le parc sur une année.

« Cetiroise » va livrer un enregistrement complet du paysage sonore sous-marin dans une large gamme de fréquences, qui correspondent aux différentes espèces de cétacés, des plus petits aux plus grands. Ces données précises acquises sur une longue durée constituent le socle nécessaire à toute action publique pour l’étude et la réduction des effets du dérèglement climatique sur la faune marine.

En mai 2023, la France accueillera pour la première fois les journées européennes de la mer… et c’est à Brest  qu’elles s’amarreront ! Ce temps fort mettra en avant le rôle crucial que jouent les océans et les mers dans la vie quotidienne des populations côtières européennes mais aussi pour l’ensemble des citoyens. Les travaux de recherche des scientifiques ne manqueront pas d’être exposés pour apporter des pistes de réflexion sur une meilleure gestion de l’environnement marin et une économie bleue durable. 

 

¹ L’équipe de recherche "Formation et professionnalisation des ingénieurs"d’ENSTA Bretagne s’intéresse aux parcours de formation à l’innovation (projet ANR Innov’ING 2020), ainsi qu’aux processus d’orientation et d’attractivité des formations d’ingénieurs et au développement des enseignements sur la transition socio-écologique (projet Erasmus+ A-Step 2030  et projet ATTRANAV).
² Le laboratoire se nomme « Formation et Apprentissages Professionnels ». Il associe les équipes de sciences humaines et de l’éducation d’ENSTA Bretagne, du Cnam Paris et d’AgroSup Dijon. 
³  Ces ouvrages concluent le projet de recherche RIIME sur les défis des formations scientifiques et techniques au Maghreb : comment former une nouvelle génération d’innovateurs responsables ? Il est le fruit d’une coopération entre 4 États : France, Algérie, Maroc et Tunisie.
⁴ « Livret RIIME de recommandations et de bonnes pratiques. Pour mieux former les ingénieurs aux enjeux environnementaux », paru en septembre 2022 aux éditions Champ social, dans la collection « Utilité sociale de la recherche en SHS »
⁵ Dans le cadre du projet d’ingénierie pédagogique HOLI-D BLUE porté par ENSTA Bretagne et soutenu par Isblue, l’école universitaire de recherche créée à Brest pour former les prochaines générations d’innovateurs et scientifiques dont l’économie bleue a besoin (réunit 9 établissements : UBO, UBS, CNRS, Ifremer, IRD, ENSTA Bretagne, Ecole navale, ENIB et IMT Atlantique).
⁶ https://www.ecologie.gouv.fr/loi-transition-energetique-croissance-verte 
⁷ Le laboratoire IRDL (Institut de Recherche Dupuy de Lôme) est une unité mixte de recherche du CNRS membre de l’institut Carnot ARTS. IRDL regroupe les 330 chercheurs et doctorants en sciences mécaniques de 4 universités et grandes écoles : UBS, ENSTA Bretagne, UBO et ENIB. + d’infos 
⁸ https://www.edf.fr/groupe-edf/espaces-dedies/l-energie-de-a-a-z/tout-sur-l-energie/produire-de-l-electricite/l-eolien-en-mer 
⁹ Projets Monamoor, Dynamo, Dimpact, + d’infos 
¹⁰ Le laboratoire Lab-STICC (laboratoire des sciences et techniques de l’information, de la communication et de la connaissance) est une unité mixte de recherche du CNRS qui regroupe les 650 chercheurs et doctorants en STICC de 5 universités et grandes écoles : IMT Atlantique, ENSTA Bretagne, ENIB, UBO et UBS. + d’infos
¹¹ 24 et 25 mai 2023 à Brest, plus d’informations