Tyméa HYO

Tyméa, ingénieure hydrographe – océanographe en thèse à l’Ifremer

07 décembre 2022
Tyméa a intégré la formation d’ingénieur ENSTA Bretagne pour l’originalité de la spécialité Hydrographie océanographie. Au terme de son stage de fin d’études réalisé à l’Ifremer, elle a décidé de poursuivre en thèse dans l’Institut. Elle y étudie les flux de fluides du plancher océanique en s’appuyant sur une méthode de Deep learning.
Tyméa
Diplômée en 2022
Doctorante en hydrographie

Pour quelles raisons as-tu choisi d’étudier l’hydrographie ?

Quand j’ai découvert l’hydrographie, je faisais une double licence en physique et mathématiques à l’UBO à Brest, mais je souhaitais faire quelque chose de plus appliqué. Les logiciels et les outils atypiques (tels que les stations totales ou les sonars) utilisés en hydrographie m’intriguaient énormément, c’est un domaine original. J’avais envie d’en savoir plus et de pratiquer. J’ai intégré la licence « Parcours d’hydrographie » au SHOM/UBO puis ai choisi de poursuivre en formation d’ingénieur en intégrant l’ENSTA Bretagne en deuxième année.

Quel souvenir retiens-tu de ta formation à l’ENSTA Bretagne ? 

J’ai beaucoup aimé ma formation à l’ENSTA Bretagne, les enseignants sont à l’écoute et les cours sont de très bonne qualité d’un point de vue technique. D’autre part, il y a une très bonne ambiance et entente entre étudiants notamment dans les clubs et associations.

Quels ont été tes terrains de stage ? 

L’année dernière, à l’été 2021, j’ai fait un stage de trois mois chez Boskalis, une société maritime néerlandaise d’assistance aux projets offshore. Sur le bateau, dans le port de Lubmin en Allemagne, j’étais chargée d’aider et superviser des levés hydrographiques journaliers sur un chantier de raccordement d’éoliennes en mer à la terre : l’occasion pour moi d’utiliser un catamaran téléguidé (Unmanned Surface Vehicule, USV) pour faire des levés au sondeur multifaisceaux. 
 Le rythme de vie était très intense, mais j’ai beaucoup appris et progressé, notamment en anglais puisque je travaillais avec une équipe internationale composée de personnes de nationalité néerlandaise, belge, française, espagnole, polonaise, allemande, ou encore estonienne.
En troisième année, j’ai effectué mon stage de fin d’études (PFE) pendant 4 mois et demi à l’IFREMER sur la « Détection automatique d’échos de fluides dans des données de rétrodiffusion acoustique de la colonne d’eau à l’aide d’une méthode de Deep-learning. »
Pendant 2-3 mois, j’ai sélectionné et adapté des réseaux de neurones pour faire de la détection automatique sur des images colonne d’eau multifaisceaux d’échos de fluides. Suite à cela, j’ai pu faire des tests en embarquant sur le navire ravitailleur Marion Dufresne pendant deux semaines pour monitorer et surveiller un volcan sous-marin au large de Mayotte. L’ambiance était vraiment super, j’ai beaucoup apprécié le fait de pouvoir échanger avec des spécialistes de différents domaines tels que des volcanologues, des géochimistes ou encore des chercheurs en géodésie de fond de mer.
 

Quel projet as-tu préféré réaliser dans le cadre de tes études ?

Le projet Guerlédan au cours duquel nous avons pu travailler en collaboration entre roboticiens et hydrographes était particulièrement prenant. Nous avions embarqué un lidar et un sonar sur un bateau pour réaliser de la détection de cibles (potentiellement dangereuses pour la navigation) sur la surface de l’eau. Je ne connaissais pas grand-chose en robotique, j’ai trouvé ces travaux intéressants et j’ai apprécié cette collaboration très enrichissante.
 

Quel poste occupes-tu aujourd’hui ?

J’ai trouvé mon emploi actuel grâce à mon stage à l’IFREMER. J’ai débuté ma thèse en octobre 2022 entre l’IFREMER et l’ENSTA Bretagne sur le même sujet que mon stage. Ma mission principale consiste à détecter et quantifier les flux de fluides qui s’échappent du plancher marin.
Les fluides en question peuvent aussi bien être des sources hydrothermales, que des sources dites "froides". Ce sont des zones du fond océanique qui laissent s’échapper par exemple du sulfure d’hydrogène, du méthane ou d’autres fluides riches en hydrocarbures. 
Ces sources sont des biomes abritant plusieurs espèces endémiques. Il est crucial de détecter et de localiser ces sources d'émissions de fluide pour les raisons suivantes : 

  • Les émissions de fluides au niveau du plancher marin affectent la chimie de l’océan et interviennent dans des processus géologiques, notamment au niveau des marges continentales actives. Ces émissions sont aussi présentes au niveau des marges passives et des marges transformantes. Les situer permet donc d'étudier les structures géologiques associées.
  • Les précipitations provoquées par les fluides hydrothermaux (par exemple les sulfures métalliques) constituent de potentielles ressources minérales. 
  • Les fluides émis en fond de mer sont impliqués dans divers aléas géologiques tels que des séismes, des instabilités sédimentaires et des relargages massifs de méthane (qui, en les quantifiant, peuvent être intégrés dans les bilans globaux de gaz à effets de serre).

Dans ma thèse, je cherche, pour commencer, à automatiser la détection de ces fluides dans des images de colonnes d'eau issues d’un sondeur multifaisceau. Ces données représentent un volume de stockage très important pour une campagne en mer et nécessitent pour le moment un temps opérateur considérable pour les dépouiller. 
J'utilise pour cela des réseaux de neurones convolutionnels (CNN), utilisés en général pour du traitement d'image. Je mets donc en place des procédures d'entraînement et de validation propres à mon contexte.

Tu viens d’obtenir le prix du meilleur projet de fin d’étude en hydrographie lors du congrès international HYDRO22. Quelle est ta réaction suite à cette distinction ?

Je remercie très fortement mes professeurs qui m’ont choisi pour représenter l’AfHy (Association Francophone d’Hydrographie) cette année. Je remercie mes encadrants de l’IFREMER et de l’ENSTA Bretagne qui m’ont accompagnée pendant le stage et la préparation à la conférence. Je ne m’attendais pas à recevoir le prix mais je suis ravie que mes travaux intéressent et plaisent à une partie de la communauté hydrographique !